Les diverses questions juridiques en matière de reconnaissance de la personnalité de l’animal et du droit de celui-ci à un traitement digne ont depuis longtemps occupé les tenants de cette cause.
La première loi de protection en la matière fut la loi dite « Loi Grammont » adoptée en date du 2 juillet 1850, comprenant un article unique :
« Seront punis d'une amende de cinq à quinze francs, et pourront l'être d'un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques. »
La question qui agita notamment la cour de cassation fut l’application de cette loi aux corridas. Nous y reviendrons ci-dessous.
Le dernier texte législatif en la matière est récent il s’agit de la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre les maltraitances animales et conforter le lien entre les animaux et les hommes.
Nous nous bornerons ici à rappeler les dispositions du chapitre 2 de cette loi concernant les maltraitances envers les animaux domestiques, ou apprivoisés, ou tenus en captivité.
Nous aborderons quatre infractions en la matière et tenterons de déterminer si et dans quelle mesure la loi a évolué, s’agissant de ces infractions :
1)   Sévices graves ou de nature sexuelle ou acte de cruauté
2)   Atteinte volontaire à la vie de l’animal
3)Â Â Â Mauvais traitements
4)   Atteinte involontaire à la vie
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1) Sévices graves ou de nature sexuelle ou acte de cruauté
Il s’agit de l’infraction la plus grave concernant les animaux accompagnant l’homme.
Auparavant, le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté ou de nature sexuelle, envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est prévu et réprimé par l’article 521-1. Les peines principales maximales encourues étaient de deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende. Il s’agissait donc d’un délit.
Les peines principales ont été portées à trois ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende. Les atteintes de nature sexuelle sont prévues et réprimées par un nouvel article 521-1, ainsi que précisé ci-après.
Il a été ajouté, après le premier alinéa, un alinéa précisant que lorsque les faits ont entraîné la mort de l’animal, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. Il s’agit donc d’une circonstance aggravante.
Il est aussi inséré un alinéa précisant que lorsque les faits ont été commis avec circonstance aggravante, sauf le cas où ils ont entraîné la mort de l’animal, la peine maximale encourue est de quatre ans d’emprisonnement et 60.000 euros d’amende.
Les circonstances aggravantes concernées sont :
-      Si les faits ont été commis sur un animal détenu par des agents dans l’exercice de missions de service public (chiens policiers par exemple)
-      Le fait d’être propriétaire ou gardien de l’animal
-      L’abandon d’un animal étant concerné par cet article, est considéré comme une circonstance aggravante le fait de perpétrer l’abandon, en connaissance de cause, dans des conditions présentant un risque de mort immédiat ou imminent pour l'animal
Les autres alinéas de cet article concernant les peines complémentaires demeurent inchangés, ainsi que l’alinéa concernant les courses de taureaux et les combats de coqs :
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie. »
Les corridas et combats de coqs, si une tradition locale ininterrompue peut être invoquée, ne sont pas concernés par cet article, alors que les sévices graves et actes de cruauté peuvent être invoqués. Le problème est le caractère flou et approximatif de cette notion. C’est donc à chaque fois la jurisprudence qui est appelée à trancher, avec une marge d’interprétation à notre sens trop large.
Les corridas et combats de coqs demeurent « sanctuarisés » pour des raisons n’ayant sans trop de doute pas grand-chose à voir avec le droit.
S’agissant des atteintes sexuelles, celles-ci sont prévues et réprimées par un nouvel article 521-1. Les mêmes peines sont encourues.
Il y a également création d’une infraction nouvelle dans un nouvel article 521-1-2 :  le fait d'enregistrer sciemment, par quelque moyen que ce soit et sur quelque support que ce soit, des images relatives à des faits constituant des infractions définies aux articles 521 (sévices graves, actes de cruauté) et 521-1-1 (atteintes de nature sexuelle) est constitutif de faits de complicité de ces infractions, et les mêmes peines sont donc encourues.
Le fait de les diffuser sur internet constitue un nouveau délit dont la peine encourue est de deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende, sauf contribution à un débat public d’intérêt général ou production en justice. Il conviendra de suivre avec intérêt les débats concernant les tortures infligées dans des abattoirs produites par l’association L614.
Un nouvel article 521-3 créée le délit de proposer ou de solliciter des faits constitutifs d’actes sexuels sur un animal. Il est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.
S’agissant de cette catégorie d’infraction, les peines ont augmenté assez légèrement. Toutefois il y a malgré tout plusieurs nouvelles circonstances aggravantes. Nous verrons si cette augmentation entraîne celle des peines effectivement prononcées, dont la clémence, pour la majorité d’entre elles, est source d’étonnement et même d’éberluement.
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2) Atteinte volontaire à la vie de l’animal
Il s’agit ici du fait de tuer un animal sans entraîner de souffance.
Auparavant, le fait, sans nécessité, publiquement ou non, de donner volontairement la mort à un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité, était prévu et réprimé par l’article R655-1 du code pénal. La peine principale encourue était celle prévue pour les contraventions de 5ème classe, soit une amende de 1500 euros.
Il s’agissait d’une infraction d’une gravité moindre que les délits.
Elle est maintenant prévue et réprimée par l’article 521-3. La peine encourue est de six mois d’emprisonnement et de 7.500 euros d’amende. Elle devient donc constitutive d’un délit (amende supérieure à 1.500 euros d’amende et/ou peine d’emprisonnement).$
La règle concernant la non-application de cet article pour les courses de taureaux et les combats de coqs s’il est justifié d’une tradition locale ininterrompue s’applique ici…
Curieusement ces faits ne semblent pas concernés par l’infraction de filmer ou d’enregistrer. Un oubli ??
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3) Mauvais traitements à animal
Auparavant, le fait, sans nécessité, publiquement ou non, d'exercer volontairement des mauvais traitements envers un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité, prévu et réprimé par l’article R654-1 du code pénal. La peine principale est celle encourue pour les contraventions de 4ème classe soit une amende de 750 euros.
Curieusement, il est interdit de filmer ou enregistrer des mauvais traitements. Leur diffusion, en l’absence de précision semble concernée par la peine encourue de deux ans et 30.000 euros d’amende. Un tel « hiatus » est surprenant juridiquement…
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4) Atteinte involontaire à la vie d’un animal
Auparavant, le fait par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, d'occasionner la mort ou la blessure d'un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité. La peine principale encourue est celle prévue pour les contraventions de 3ème classe, soit une amende de 450 euros.
Cet article est inchangé.
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Il ressort de ce qui précède que, même si les peines ont augmenté s’agissant des infractions les plus graves, elles demeurent à notre sens, légères.
Toutefois demeure également, pour toutes les infractions la possibilité pour le juge de retirer l’animal de son propriétaire ou détenteur pour le confier à une association de protection animale.
En conclusion, il s’agit d’une loi dont les progrès, bien que « timides » ne sont pas négligeables.