Arrêtés municipaux d'interdiction du torse nu

(Deuxième partie de la chronique de Naturisme Magazine N° 27)

 

Nous avons vu ici que l'État de New-York avait explicitement autorisé le torse nu pour les femmes.

Qu’en est-il dans notre législation ? Elle est fondamentalement différente. Le texte qui pourrait s’appliquer est le fameux article 222-32 du Code pénal :

« L'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

Ainsi que les articles L2211-1 et L2211-2 du Code général des collectivités territoriales concernant les pouvoirs de police du maire :

« Article L2211-1

Le maire concourt par son pouvoir de police à l'exercice des missions de sécurité publique

Article L2212-1

Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l’État dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l’État qui y sont relatifs. « 

La question est donc simple : une poitrine féminine visible est-elle constitutive d’exhibition sexuelle ?

Ainsi que : un maire peut-il interdire le topless pour femmes ainsi que pour les hommes ?

Il avait été jugé en 1965 qu’une femme seins nus jouant au ping-pong à la plage avait commis l’infraction d’outrage public à la pudeur du code pénal de l’époque.

Mais cet article déjà immortalisé par une pièce de Courteline au 19ème siècle, était susceptible de voir son interprétation évoluer au fil du temps et de la libération des mœurs.

Or il n’y a à notre connaissance aucune jurisprudence publiée en matière de seins nus et d’exhibition sexuelle.

Actuellement la jurisprudence, avec l’infléchissement actuellement constaté à Périgueux considère l’infraction constituée qu’en cas d’exhibition des parties sexuelles du corps.

Ce qui signifie qu’il faudrait considérer que les seins sont une partie sexuelle… On ne peut que souhaiter bon courage à celui qui plaiderait une telle affirmation devant un tribunal, en raison surtout du fait de leur fonction nourricière.

Mais en revanche, le torse nu peut être interdit par arrêté municipal en vertu des pouvoirs de police du maire, ceci en vertu de l’article R610-5 du Code pénal :

« La violation des interdictions ou le manquement aux obligations édictées par les décrets et arrêtés de police sont punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 1re classe. »

L’amende en ce cas est de 38 euros.

Qu’en est-il de la légalité de ces arrêtés : un début de réponse a été apporté en 2008 par le Tribunal administratif de Montpellier annulant un arrêté édicté par la Commune de la Grande-Motte

Cette annulation n’a été prononcée toutefois, que dans la mesure où son immoralité alléguée ne s'accompagnait d'aucune circonstance locale particulière.

En se basant sur cette décision, l'éventuelle atteinte à la décence vestimentaire en elle-même n’est pas suffisante. Il faut également une condition tenant aux « circonstances locales ». Un tel arrêté serait donc probablement valide dans des communes qui sont par ailleurs des lieux de pèlerinage.

Le fondement n’est donc pas comme dans l’Etat de New-York, le principe de non-discrimination.

Il serait toujours possible pour une femme verbalisée à Paris-Plage de contester l’amende sur cette base. On verrait ainsi quels seraient les circonstances locales de la capitale.

 De plus y’a-t’il des précédents. A notre connaissance, les femen n’ont jamais été verbalisées !! L’une d’elles est toutefois poursuivie sur la base de l’article 222-32 qui ne nous apparaît pas loin s’en faut constituer la meilleure des bases !!!

En tout cas, sur ce point comme sur d’autres, la marche vers l’égalité hommes-femmes semble encore longue…

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