La question des photographies et autres films pris en milieu naturiste se pose souvent, peut-être même plus souvent qu'ailleurs du fait de son contexte particulier. Les agissements de certains personnages peuvent être à l'origine d'altercations dont nous pourrions être éventuellement protagonistes si nous étions nous-mêmes piégés. L'étendue des droits desdits preneurs et de leurs " modèles " involontaires ou non apparaît donc d'actualité. Le sujet est vaste et le propos du présent texte est de n'en donner qu'un bref aperçu. Sont abordés les trois points suivants :

1) Le droit à l'image

2) La violation de ce droit en matière pénale

3) La violation de ce droit en matière civile

 

1) Principe de la protection du droit à l'image

Le droit à l'image est une composante du droit à la protection de la vie privée. Ce droit est consacré par l'article 9 du Code civil :

"Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée; ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé."

Il concerne toutes les personnes, qu'elles soient célèbres ou non, mineures ou majeures etc. Le juge peut ordonner des mesures y compris en référé. Le référé est la procédure d'urgence. Simplement dans ce dernier cas il faut justifier de ladite urgence et de la menace d'un dommage imminent ou de la survenance d'un trouble manifestement illicite. Il s'agira par exemple d'une photo prise dont on peut prouver qu'il y a des risques d'une diffusion imminente soit sur une page web, soit dans une publication quelconque. La preuve de l'urgence n'est donc pas évidente à rapporter.

2) La violation du droit à l'image en matière pénale

L'infraction existe mais ne serait susceptible de concerner qu'indirectement le naturisme Il existe une infraction dénommée " atteinte à l'intimité de la vie privée " abordée par les articles 226-1 et 226-2 du Code pénal :

"Article 226-1

(Ordonnance nº 2000-916 du 19 septembre 2000 art. 3 Journal Officiel du 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002)


Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui :
1º En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;
2º En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé.
Lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé.

Article 226-2

Est puni des mêmes peines le fait de conserver, porter ou laisser porter à la connaissance du public ou d'un tiers ou d'utiliser de quelque manière que ce soit tout enregistrement ou document obtenu à l'aide de l'un des actes prévus par l'article 226-1.

Lorsque le délit prévu par l'alinéa précédent est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables."

Nous voyons donc que, concernant les images, elles ne concernent la loi pénale que si elles ont été prises dans un " lieu privé ", le lieu privé pouvant se définir comme un lieu où on a accès que avec autorisation de celui qui l'occupe de manière permanente ou temporaire. Ceci ne devrait pas concerner le naturisme ou alors de façon très marginale, une plage, une piscine d'un centre, un chemin ou une allée n'étant pas un lieu privé au sens de cet article, à partir du moment où elle est accessible à tous les estivants. Le délit serait constitué si les victimes étaient photographiées ou filmées dans le bungalow où ? une proximité immédiate où elle pourraient espérer ne pas être vues. Il est par ailleurs intéressant de noter que dans ce cas, l'infraction est constituée même en " fixant ", c'est-à-dire à partir du moment où on appuie sur le déclencheur. Et comme même la tentative est punie, le fait que la pellicule soit voilée ou la photo ratée ne change rien.

Concernant le cas particulier des images de mineurs, cliquer ici.

 

3) La violation du droit à l'image en matière civile

le droit à l'image est absolu Comme il est dit plus haut, le droit à l'image, comme le droit à la protection de la vie privée dont il fait partie intégrante est un droit qui ne peut faire l'objet d'aucune dérogation, et qui concerne tout le monde, quel que soit son age, ou sa renommée. L'application particulière faite ici est que chacun dispose sur son image et sur l'utilisation qui en est faite un droit exclusif lui permettant de s'opposer à sa reproduction et à sa diffusion dès lors qu'elle n'y a pas consenti. Contrairement en matière pénale, ce n'est pas la prise de la photo qui compte, mais sa reproduction, voire sa diffusion. Les seuls tempéraments au principe sont appliqués quand il est établi que le photographe/vidéaste ne visait pas la personne elle-même. Il s'agit des photographies de foule, ou à tout le moins de groupes. Rentreraient dans ce cas de figure les panoramiques de piscines ou de plages. Il en est bien sur autrement en cas d'agrandissement d'une partie de l'image pour faire apparaître une ou quelques personnes déterminées. Il convient dans ce cas que les " sujets " ne puissent pas être immédiatement reconnaissables. De même une décision fait valoir l'absence de préjudice dans le cas d'une photo publicitaire pour un espace commercial (boutique) et où la personne a été prise par mégarde (décision à mon avis contestable).

Mais une jurisprudence existe en matière de publication de photos en milieu naturiste. Il s'agit d'un arrêt de la Cour d'appel de Grenoble qui avait à trancher entre autre la question de savoir si un journal publiant un dossier sur le naturisme en l'illustrant avec la photo d'une personne dans un centre, et sur la même page celle d'un couple se livrant à des ébats sexuels engageait sa responsabilité vis-à-vis du modèle pris en milieu naturiste.

Elle a répondu par l'affirmative, au moyen d'un attendu qui ravira ceux qui luttent contre l'assimilation du naturisme à une pratique sexuelle :

"L'image de V. P. n'est pas outragée par le cliché lui-même, mais la juxtaposition de ce cliché avec une photographie représentant un couple s'adonnant à des ébats sexuels sur une plage, ce qui est censé illustrer une pratique nudiste constitue un contexte dévalorisant pour Mademoiselle P...".

Pour celui qui veut prendre des photos de sa famille et que d'autres vacanciers (naturistes ou non) se trouvent dans le champ de vision de l'appareil, est de leur demander s'ils n'y voient aucun inconvénient. A titre personnel, cela n'a jamais posé le moindre problème.

 

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